Il y a une haute colline dans ma région natale, où dort un martyr. Au pied de la montagne se trouve la rivière Mugere qui coule jour et nuit, et la route devant le cimetière est bondée de monde. Ce martyr garde la centrale hydroélectrique de Mugere comme un saint patron et protège également tous ceux qui passaient à côté de lui. Il a participé à la construction de la Centrale hydroélectrique de Mugere, il est chinois et s'appelle Li Hai, mon frère chinois.

 la Centrale hydroélectrique de Mugere

 

Bien que le temps soit long, la mémoire est toujours claire.

Il y a plus de 40 ans, en novembre 1977, une équipe chinoise est venue dans ma région natale, ils ont ouvert les chemins dans les montagnes, construit des ponts et se sont installés dans les vieilles forêts au fond des montagnes. A cette époque, j'étais encore un jeune homme. J'ai entendu dire que la Chine allait aider le Burundi à construire une centrale hydroélectrique. J'étais très heureux et je me suis inscrit pour participer à la construction. J'ai rejoint l'équipe de construction d'ingénierie et j'ai rencontré mes frères chinois.

J'ai été affecté à un groupe de travail pour la construction du barrage dont le chef était Monsieur Li Hai, qui était dans sa cinquantaine et était un expert en ingénierie de charpente. Il était venu de la centrale hydroélectrique de Dahua de la province de Guangxi de Chine, et est venu au Burundi avec la société de construction du Guangxi Hydropower Engineering Bureau. Le premier jour de travail, Monsieur Li Hai est venu vers nous et a dit la première phrase qui était "Nous serons frères à partir de maintenant!". En effet, à partir de ce jour, nous avons mangé, vécu et travaillé ensemble. La différence est que Monsieur Li Hai était très compétent, nous apprenait à manipuler les barres d'acier, à mélanger le ciment et nous a appris également à parler chinois. Bien sûr, nous lui avons aussi appris à parler le Kirundi, notre langue et lui avons parlé des coutumes du Burundi. Il était très sympathique et joyeux. J'étais un employé local relativement jeune, alors Monsieur Li Hai a pris soin de moi et m'a toujours demandé d'acquérir des compétences. Voyant que j'étais fatigué, il me laissait me reposer un moment, et se précipitait pour me trouver des médicaments lorsque j'étais malade, il était comme mon frère. Lorsque mon chinois a atteint un certain niveau, il m'a nommé à la tête du personnel burundais. Nous avons eu une relation très profonde avec lui.

Dans ma mémoire, Li Hai et ses collègues chinois travaillaient toujours dur et passionnés. Aucune difficulté ne pouvait les surprendre. A ce moment-là, je ne comprenais pas pourquoi ils sont venus de très loin jusqu'à notre montagne pour aider les Burundais. Un jour, je n'ai pas pu m'empêcher de poser cette question à monsieur Li Hai. Il a souri et a dit que le Burundi et la Chine sont frères et que les frères devraient s'entraîder. Peu à peu, j'ai compris le sens de la fraternité: il est possible de devenir frères entre les peuples, entre les nations et entre les pays, tout comme le Burundi et la Chine.

Le 19 avril 1978 fut une triste journée.

Ce matin, nous prenions un camion rempli de planches de construction de la route d'accès pour entrer dans la zone de construction du barrage .En raison de la route de montagne accidentée, notre véhicule a soudainement basculé dans le ravin du bord de la route. Parmi les trois personnes assises dans la cabine, le conducteur et le copilote ont pu sauter de la voiture à temps, mais monsieur Li Hai, qui était sur le siège du milieu, a dévalé dans la falaise avec la voiture. Lorsque nous l'avons retrouvé au fond du fossé, il était malheureusement déjà mort et n'avait que 48 ans. De cette façon, une vie vivante est décédée, et mon frère est parti, il a consacré son sang et sa vie à cette montagne profonde et au Burundi. Sa mort nous a rendus très tristes, comme si nous avions perdu un être très cher. Nous avons tous pleuré sa mort et les travaux ont été suspendus pendant trois jours de deuil, et le quatrième jour nous l'avons enterré à Ruziba.

Depuis lors, les constructeurs ont transformé leur chagrin en force et ont travaillé plus dur. La centrale hydroélectrique a été achevée en juin 1982. Il s'agit de la célèbre centrale hydroélectrique de Mugere au Burundi. Elle est située dans le cours inférieur de la rivière Mugere, une rivière de l'ouest du Burundi, à environ 25 kilomètres de la capitale économique Bujumbura. La capacité installée de la centrale est de 4 × 2 MW et la production annuelle moyenne d'électricité est de 42 millions de kWh. Le projet comprend un barrage, un tunnel de dérivation, un réservoir d'équilibre, des conduites forcées, une centrale électrique, une station de surpression, une ligne de transport d'électricité de 25 km et le poste de Bujumbura. Le projet a débuté en 1977 et officiellement mis en production en 1982. Il s'agit de la centrale électrique de base de la production électrique du Burundi, fournissant environ 25% de l'électricité du Burundi. La centrale hydroélectrique de Mugere est un symbole de l'amitié fraternelle entre la Chine et le Burundi, formée de sang et de vie.

Dès lors, je garde toujours à l'esprit les enseignements de mes frères, j'étudiait avec diligence et je travaillais dur pour finalement devenir l'employé officiel et le gardien de la centrale hydroélectrique de Mugere. Quarante ans se sont écoulés et la centrale est toujours aussi performante. Le barrage ne fuit pas, les différentes structures hydrauliques fonctionnent normalement et les équipements de production d'électricité fonctionnent à pleine capacité .Je peux réconforter mon frère, Li Hai.

Chaque année, à l'occasion de la fête de Qing Ming, l'Ambassade de Chine au Burundi, des représentants du gouvernement burundais, des institutions et entreprises  chinoises au Burundi et des Chinois d'outre-mer se rendent tous à la tombe du martyr Li Hai pour lui rendre hommage. Je vais aussi souvent au tombeau pour commémorer ce frère qui gisait dans les montagnes de Burundi. La Chine est le pays le plus ami du Burundi. Sans les efforts des frères chinois, il n'y aurait pas de développement du Burundi aujourd'hui. Je suis toujours reconnaissant à la Chine et à mes frères chinois. Qu'il repose en paix!

 

 Remarque: L'auteur est Vital Manirakiza, un employé de la Centrale hydroélectrique de Mugere et un ancien collègue du Martyr Li Hai.